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“Notre entreprise prône l'art de se mettre au vert !”

Fabrice Boutin et Ludovic Millasseau, respectivement dirigeant et commercial des pépinières Boutin, installées à Saint-Avaugourd-des-Landes (85), ont tenté une diversification vers les murs végétalisés et systèmes équivalents. Objectif : faire sans cesse évoluer leur société pour en assurer la pérennité.

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« Ce n'est pas facile d'apporter des changements. Les murs végétaux commençaient à être dans l'air du temps, se souvient Ludovic Millasseau, commercial pour les pépinières Boutin. Étant assez isolés dans notre secteur, et parce qu'une pépinière a besoin de se faire (re)connaître, nous cherchons toujours à nous démarquer, pour que la clientèle ait de bonnes raisons de venir chez nous. Nous ne faisons jamais dans le conventionnel, nous cherchons à innover. C'est ainsi que nous avons conçu le bac Flora-Mobil®, une structure comme un tableau végétal, simple, légère, et esthétique, d'un mètre carré, accessible à tous pour que n'importe quel jardinier, même novice, puisse l'installer lui-même ou le faire installer. » Ce concept est disponible à moins de 500 euros/m2 TTC. Il se pose sur des chevrons comme une grande tuile maniable (15 à 20 kg), s'adapte à tous types de toits (en isolation thermique et acoustique) et à tous les murs plus ou moins inclinés. Il est destiné aux pergolas, emplacements de parking (carport), abris ou serres de jardin, ou pour réaliser des fresques végétales en intérieur, dans un patio ou sur une terrasse.

Au départ, la pépinière avait choisi des bacs pour les toitures végétalisées. Elle s'est lancée sans détenir de formation spécifique, mais en s'appuyant sur son expérience. « Il y avait cependant déjà des fournisseurs sur ce créneau. Nous avons donc cherché à faire autre chose. » Dans cette optique, Fabrice Boutin a travaillé avec Mickaël Ferré, son responsable de la production hors-sol, et un ingénieur en plasturgie. Différents essais ont permis de faire évoluer, d'améliorer et de finaliser le projet. Des clients, en phase pilote, ont également été sollicités pour donner leur avis en situation réelle. Parmi les défis à relever, il y avait l'étanchéité, notamment sur les toits plats, ou la tenue du substrat dans les utilisations inclinées. Car le produit peut servir dans les deux situations. « Nous avons protégé et breveté – pour l'Europe – le module de base, le système de plaques facettes et leur attache sur le devant. Résultat : des paysagistes nous ont envoyé des clients potentiels. C'était l'objectif attendu. Nous avons été reconnus pour cette nouveauté, y compris par des professionnels espagnols, allemands, néerlandais...

Ce concept permet de valoriser nos plantes : nous ne sommes plus seulement des producteurs. Nous allons aussi vers des utilisations plus décoratives. Dans un contexte économique difficile, chacun, y compris le producteur, doit trouver la façon de se mettre en avant. » Flora-Mobil® peut être livré vide ou déjà pré-végétalisé : le substrat pèse 27 kg/m2 à sec, – il peut atteindre de 67 à 80 kg/m2 lorsqu'il est mouillé –, pour 10 cm d'épaisseur, avec 2 modules/m2. Il a également fallu optimiser le paramètre irrigation. Ainsi, en 2014, une solution pratique a été trouvée pour insérer les goutte-à-goutte afin que tout s'emboîte facilement. L'entreprise a par ailleurs élargi la gamme à des modules colorés, plus dans la tendance, pour lesquels un nouveau procédé de peinture a été trouvé et expérimenté. « Avec une base neutre, noire, et maintenant des couleurs, nous apportons un plus avec une option de personnalisation ! » Cette évolution sera présentée au prochain Salon du végétal, à Angers (49).

Un gros travail a été effectué pour proposer une palette de végétaux bien adaptés. « Nous cherchons à associer les plantes qui vont bien ensemble, celles qui ont les mêmes aptitudes (chaleur, lumière, hygrométrie, froid jusqu'à - 20 °C). Une palette de Carex ou Phormium, de succulentes et graminées, de vivaces et petits arbustes a été retenue. Ces plantes bien racinées à la pépinière, en pot, peuvent s'installer dans les modules en toute saison. Le recouvrement est complet en dix-huit à vingt-quatre mois. « Nous testons des options sans arrosage, ou facilement rattrapables en fin d'été avec des végétaux spécifiques. » Un substrat organique et minéral, drainant et/ou rétenteur, a aussi été breveté. « Nous avons collaboré avec Star, de La Rochelle (17), notre fournisseur depuis presque quarante ans. Les plantes ne doivent pas seulement apporter de la verdure, mais permettre de réaliser de minipaysages qui tiendront bien sur le long terme. Là, il s'agit d'une compétence de notre métier de pépiniériste. Car maintenant, les clients souhaitent des associations sûres et plus colorées, plus actuelles. »

Les pépinières Boutin n'en sont pas à leur première tentative d'innovation pour se démarquer. Depuis une vingtaine d'années, Fabrice Boutin consacre 10 hectares à l'entrée de la pépinière à un showroom des compétences des clients paysagistes les plus fidèles. Dans ce Floraparc, chacun peut réaliser une scène sur 100 m2 ou plus. Plantes et espaces sont offerts gracieusement « contre le droit d'entretenir »... Les paysagistes retenus bénéficient ainsi d'une vitrine pérenne et la clientèle peut donc avoir une idée de ce que peuvent réaliser les professionnels du secteur. « Le showroom se visite gratuitement toute l'année. Mais cet espace est animé, en particulier, lors de nos portes ouvertes qui sont aussi celles de nos clients partenaires. Cet événement permet de montrer les spécialités de chacun (gazon naturel, artificiel, béton poreux, élagage) et de rendre visible toute la filière ornementale et ses métiers dans notre région », assure Ludovic Millasseau.

Greeny-Golf®, un concept exclusif de petits terrains de golf paysagés est issu de la passion de Fabrice Boutin pour la pratique de ce sport. Adaptable sur n'importe quelle surface extérieure ou intérieure, il associe une pelouse synthétique et si possible un contour paysagé avec de véritables plantes. Les parcours, originaux et personnalisables, sont pensés et posés en partenariat avec Étienne Bonnin, un paysagiste spécialisé. Ils peuvent s'étendre de 700 à 1 500 m2 environ, avoir de 1 à 18 trous... Du synthétique : un paradoxe pour un pépiniériste ? Pas tant que cela pour Fabrice Boutin qui crée des parcours ludiques, faciles d'entretien, pour petits et moyens espaces, pour les particuliers ou les professionnels ne disposant pas de grandes surfaces ni d'équipes d'entretien, tels que les campings, les hôtels, certains golfs... Ainsi, il démocratise une activité qu'il aime et qui peut devenir accessible à tous, petits et grands, avec des règles simplifiées et sa propre carte de scores.

Fabrice Boutin est prêt à militer pour adapter ce concept aux ronds-points, souvent difficiles à entretenir. « Je sais comment travailler les pelouses synthétiques, naturelles, et les végétaux d'ornement. On peut choisir de beaux arbres et rendre la partie synthétique quasi invisible vu la qualité des gazons aujourd'hui. Cela permet de végétaliser en conservant la qualité, et de faciliter le travail (pour des accès souvent dangereux tels que les ronds-points), en réduisant les apports d'eau, les interventions de tonte et de désherbage, les coûts de réalisation... Les villes gagneraient énormément de temps d'entretien pour ces lieux qu'on ne fait que contourner, et pourraient utiliser leurs équipes pour s'occuper du fleurissement par ailleurs. Notre métier est un beau métier. Il faut savoir le préserver, mais aussi l'adapter, dans un contexte économique peu ou moins favorable. Nous prônons l'art de se mettre au vert et "l'innovation golfique", du naturel au synthétique », conclut le dirigeant de la société.

Odile Maillard

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